ANNE SOPHIE MORELLE

Lettre à un acquéreur des loups

‘’ Ils sont là. Ils attendent. Ils vont partir pour venir. Quitter pour arriver. Je les ai bien regardés. Ma part en eux est là sous vos yeux, indemne, palpitante et caduque, je le sais. Ce sont mes loups, mes bêtes. Ils sont l’animal et l’instinct en moi qui chahutent, m’orientent, flambent. Alors je vais vous les raconter comme une histoire d’homme.

Le clic est venu il y a bien longtemps au détours d’une revue. C’était la nuit. Je feuillette et soudain je m’arrête net. L’image est plutôt petite. Mes yeux la fixent. Ils sont là : loups blancs.

L’image est blanche. Blanche de neige. De lumière. De cette pâleur immense et calme. Le blanc des soustractions. Le blanc diaphane. Et eux : ils vont. Ils marchent. Ils cheminent. Sont en route côte à côte, prés. Pas proches. Pas confondus. Pas sous le regard ferme de l’alliance. Mais liés, si liés par l’épais silence ou manteau  du respect, avec une liberté magistrale ils vont.. Tacitement, ils vont. avec une foi en eux. Pour la loi du juste ils vont.

Une fois de plus, le couple revient à la charge. Une fois de plus l’amour avec ses signes de solitudes, d’humanités, de puissances, de mystères et de beautés extrêmes.

Pourquoi ma paire de loups pour vos dix ans de mariage, qui vont si sereins, si confiants, si continus dans le temps. Cela ne vous ressemble-t-il pas ? Comme un portrait. Les couples qui rayonnent sont comme des signes justes, des valeurs fondamentales, des essentiels.. Sans, où irait on ?

Des loups, j’en aurais bien fait trente. En bronze ; ils iraient. Ils serraient la base, le socle. Et parmi eux, entre eux, montés sur des longues tiges d’acier des hommes en arrêt de mouvement. Des hommes dans l’instant. En verre et en fragilité. L’image est très nette dans ma tête, une parmi bien d’autres et vous connaissez la suite, celle du temps ….

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